Un café sans sucre, s’il vous plaît !

Saviez-vous que sans sa cafetière Balzac n’aurait certainement pas pu venir à bout de son œuvre La Comédie humaine ? Imaginez combien de rendez-vous, d’entretiens, de rencontres auraient perdu de leur saveur sans une tasse de café ? Plante intellectuelle, le café préside la vie sociale grâce à ses vertus stimulantes, au point d’être devenu l’une des boissons les plus consommées sur la planète.
Un café sans sucre, s’il vous plaît !

La découverte des bienfaits du café remonte au Moyen-Âge. Les légendes sont nombreuses autour de la « fève d’Arabie ». L’histoire raconte qu’un éleveur de la région de Kaffa, en Éthiopie, aurait vu ses chèvres manger les baies rouges du caféier et devenir soudain très dynamiques, stimulées par la caféine. Une fois jetées dans le feu, les baies auraient grillé en exhalant une bonne odeur. Elles auraient ensuite été réduites en poudre, infusées dans l’eau bouillante pour être transformées en boisson.


En pays musulman, les vertus du café sont progressivement reconnues pour permettre de rester éveillé le soir pour prier. Il devient le fruit d’un commerce florissant dans le monde arabe, notamment au Yémen où le « kawa » transite par le port de Moka, puis à Constantinople et au Caire. Il est introduit en Italie au XVIe siècle via les marchands vénitiens, avant de gagner la France, l’Angleterre, la Hollande et les colonies. Ces dernières sont particulièrement propices à sa culture, le coffea arabica – arbrisseau aux fleurs blanchâtres de la famille des Rubiacées – ayant besoin de chaleur et d’humidité pour pousser et donner ses graines appelées « cerises ».


À la différence des Anglais, qui lui préféreront le thé, le café devient la boisson française par excellence. Le Procope est le premier établissement de café à ouvrir à Paris en 1686. En France, l’on raconte que c’est Louis XIV qui en but la première tasse. Il est ensuite adopté par la Cour et la société aristocratique. Les cafés se développent à Paris où ces lieux de rencontre ont un rôle social. Ils symbolisent l’esprit français et le goût pour les échanges intellectuels.


Au XIXe siècle, la boisson se démocratise. Balzac écrit La Comédie humaine, animé par cette muse brune. Véritable bourreau de travail, l’écrivain buvait chaque jour des dizaines de tasses de café. Il relate dans son Traité des excitants modernes : « Ce café tombe dans votre estomac [...]. Dès lors, tout s’agite : les idées s’ébranlent comme les bataillons de la grande armée sur le terrain d’une bataille, et la bataille a lieu. Les souvenirs arrivent au pas de charge, enseignes déployées ; la cavalerie légère des comparaisons se développe par un magnifique galop ; l’artillerie de la logique accourt avec son train et ses gargousses ; les traits d’esprit arrivent en tirailleurs ; les figures se dressent ; le papier se couvre d’encre, car la veille commence et finit par des torrents d’eau noire, comme la bataille par sa poudre noire. »


Une maison sans café est comme une maison sans livres : il y manque une forme d’énergie secrète. C’est pourquoi, même si vous n’en buvez pas, pensez à Balzac et ayez toujours chez vous un fond de café pour ceux qui l’aiment, court ou long, avec ou sans sucre, avec ou sans lait. Et, bien sûr, quand la tasse aura été reposée sur la soucoupe, n’omettez pas le rituel si français de dire avec grâce : « Reprendrez-vous une tasse de café ? » 

Ne manquez pas de lire, ou relire notre billet sur : « Voulez-vous une tasse de thé ? »

Le Déjeuner, F.Boucher, 1739 © WK.