Bayard est mort, vive Bayard !

Le 30 avril prochain, nous célébrerons le cinquième centenaire de la mort​ de Bayard, vous savez, le chevalier sans peur et sans reproche ! L’une de ses devises fut « Accipit ut det » – « Il reçoit pour donner » – devise que, le connaissant, on serait assez tenté d’interpréter par : « il a reçu beaucoup de dons pour donner beaucoup de baffes ». Voyons d’un peu plus près de quoi il retourne.
Bayard est mort, vive Bayard !

Si la Très joyeuse et très plaisante histoire du gentil seigneur de Bayart, le bon chevalier sans peur et sans reproche brosse le portrait d’un héros qui incarne à lui tout seul les valeurs de la chevalerie française, il semblerait que, pour une fois, le trait ne fut pas forcé. Bayard était visiblement un bon gars. 

Entré comme page, vers l’âge tendre de 11 ans, à la cour de Charles Ier, duc de Savoie, il est aussitôt surnommé «Riquet» puis «Piquet». Il faut dire qu’il « pique » copieusement de l’éperon les chevaux aux galops trop pépères. Ce qu’il veut, c’est aller vite, c’est vivre fort. Sa fougue et ses qualités physiques, son courage aussi font des merveilles. Il est remarqué. 

La bataille du Garigliano – pas celle de 915 qui fut fatale aux Sarrazins repoussés par une coalition de catholiques et de Byzantins ; pas celle du 29 octobre 1860 qui opposa le royaume de Sardaigne au royaume des Deux-Siciles ; ni celle de mai 1944 qui permit aux Alliés de reprendre leur progression vers Rome – mais bien celle de 1503 qui bouta les Français hors du royaume de Naples, illustre parfaitement les œuvres du chevalier Bayard. 

Se trouvent en présence, une armée de France essoufflée et les espagnols de Gonzalve de Cordoue déchaînés. Figurez-vous maintenant le Garigliano, un fleuve à batailles qu’enjambe un pont. Étroit le pont. À l’une de ses extrémités, observez attentivement Bayard. Il est en simple pourpoint, ayant rallié à la dernière minute le petit détachement d’éclaireurs qui soudain se trouve confronté à des paquets d’ennemis. Les jambes écartées et l’épée dégainée, il fait barrage. Sans cuirasse et sans casque, mais sang bouillonnant et sans peur (et sans reproche), il repousse un à un les espagnols contraints par l’étroitesse du passage. Il faut toute l’ardeur et les grognements de ses compagnons François de Bourdeille et Ymbault de Rivoire pour qu'il leur en laisse une part. 

Il y a du Robin des bois croisant le fer sur un tronc au-dessus de l’eau, il y a de l’Obélix fonçant dans un tas de romains dans ce grand garçon qui n’eut jamais la trouille, pas même de tenter d'enlever en 1510 le pape Jules II, ni même d’adouber son roi de 20 ans, François Ier, au soir de la victoire de Marignan en, mais tout le monde le sait, 1515. 

Moins de 10 ans plus tard, le 29 avril 1524, à la bataille de la Sesia, toujours aux côtés de François, Bayard est mortellement blessé d’un coup d’escopette reçu dans le dos. À ses amis qui veulent lui faire regagner l’arrière, il rappelle dans un souffle : « Je n'ai jamais tourné le dos devant l'ennemi, je ne veux pas commencer à la fin de ma vie ». Il meurt le lendemain, dans le camp adverse, pleuré par ses ennemis. Sans peur, sans reproche, mais avec l’estime de tous… Bayard est mort, vive Bayard !

Job,  À l’issue de la bataille de Marignan, le roi, François Ier demande à Bayard de l’adouber © vm